Novembre

Vendredi 1er novembre
Fête des saints. Il fait beau.
Hier, repas avec Heïm et Alice. Essentiel pour ma formation. Il faut que je lutte contre ma na­ture timorée. Je dois savoir prendre les salauds par le col, lorsqu'ils effleurent l'idée de nous re­mettre en cause. Heïm nous dit que plus nous réussirons, plus nous aurons d'ennemis. Armons-nous dès à présent. La seru est une aventure formi­dable. Tous ces fournisseurs et autres fonctionnaires n'ont qu'à bien se tenir.
Lu le dernier Astérix, La Rose et le Glaive écrit et dessiné par Uderzo. Le sujet : une pétasse de Lutèce, venue comme barde, tente d'insuffler le féminisme dans le village. Au début de l'album, Uderzo précise que le scénario a été écrit en 1990 et les dessins finis en mai 91, au cas où Madame notre Premier ministre croirait à une moquerie à son encontre. Bonjour la liberté d'expression. Même dans une bande dessi­née il faut lécher dans le sens du pouvoir. L'histoire est amusante, mais la mort de Goscinny se ressent à chaque phylactère.
Je lis dans un ouvrage juridique consacré à la propriété littéraire et artistique que, au contraire de l'œuvre littéraire, « l'œuvre musicale ne s'adresse pas directement à l'intelligence, mais aux sens » (C. Colombet). [...] La peinture et la sculpture forment certaine­ment les arts les plus accomplis puisqu'ils font d'abord appel aux sens mais peuvent aussi titiller l'intelli­gence.

En ce moment, conférence de réconciliation is­raélo-arabe au Proche-Orient. Très mauvais dé­but : le petit Shamir et le géant de Syrie ne se ménagent pas. L’ampleur des dépenses réalisées pour assister à des joutes verbales dignes d’un parc de mioches, c'est pitoyable. Depuis des an­nées chacun s’agrippe à ses convictions. A quoi cela aura-t-il servi, si au bout du compte tout se règle ? A avoir répandu le sang pour de grandes causes inutiles.
La tartuferie des dirigeants au quatre coins du monde et la bêtise épaisse des masses humaines me dégoûtent tout autant. Et pourtant la vie... quelle merveille !
Bonheur immense d'avoir ma Kate au télé­phone. Demain, elle prend le train et rentre au bercail. Très douce dans sa voix. Je la sens en manque de moi. Nos discussions sérieuses comme celle sur le sida ; nos tendresses comme les gros bisous dans le combiné avant de se quitter ; nos coquineries en tous genres ; notre intimité est dé­terminante pour l'équilibre de chacun. Il faudrait tout de même que l'on se voie plus souvent. Paix en moi d'avoir une belle jeune fille qui m'aime, quels que soient ses défauts.
Sally nous a rapporté quelques images et pho­tos de différents châteaux susceptibles d'être achetés. Très excitant de s'imaginer dans telle ou telle bâtisse. On rejoint là les mille et un plaisirs de l'enfance extraordinaire que Heïm nous a don­née.

Samedi 2 novembre.
Fête des morts. Le ciel est bleu.
Bientôt minuit, une journée apaisante tire ses voiles. Au fond de mon lit, j'entends au-dessus la télé de Karl ; au dehors le vent souffle dans le grand tilleul, et un aboiement de chien vient du lointain. Je me sens d'une sérénité châtelaine. Lundi, grand départ pour un mois qui s'annonce difficile. Pour moi, première des semaines décou­pées : à Chaulnes du lundi au mercredi, à Paris du jeudi au samedi ; le dimanche à destination va­riable.
Kate est de retour à Lagny depuis onze heures. Elle m'a passé un mignon petit coup de fil.

Dimanche 3 novembre.
Toute la nuit de fortes bourrasques ont secoué le tilleul et les alentours. Sommeil difficile, mais sentiment de bien-être absolu. Loin des trépidations maladives des mégapoles, la vie prend sa meilleure saveur, le travail s'annonce énorme et passionnant.
Journée paisible, le nez entre la gestion de la société et la lecture d'ouvrages juridiques. Côté gestion : rédaction d'un courrier mettant en garde la poste de la déficience de son service postcon­tacts et l'infor­mant de la suspension de nos règle­ments pour les distributions de prospectus qui ont été mal faites, voire pas faites du tout ; calcul des cotisations à verser à l'agessa pour le troisième trimestre en fonction des droits d'auteur versés. Côté droit : allées et venues entre la propriété lit­téraire et artistique, les relations collectives dans le droit de travail, le droit fiscal des affaires et le droit de la sécurité sociale. Que des trucs bandants pour abréger.
Demain matin, le directeur admi­nistratif et financier fera son entrée en scène. Je lui expliquerai l'utilité de son recrutement et les objectifs à atteindre. La seru et la sebm doivent prendre leur élan et atteindre le niveau in­dustriel, tout au moins dans l'efficacité de la pro­duction et de la vente. Son expérience doit être mise au service de nos structures et nous être insuf­flée dans la pratique.
Deux secteurs pour lui : d'une part, tout le délice qui touche à l'administration, à la comptabilité, et au personnel, d'autre part le fruit juteux des avantages dont on peut bénéficier sur le plan financier et pourquoi pas la découverte d'une clientèle extérieure pour la sebm S'il remplit bien sa tâche, il contribuera à l'assainis­sement des deux maisons.
Petit instant avec Kate au bout du fil, le temps d'aspirer quelques sonorités de sa petite voix. Elle prépare son cartable pour demain : ses premiers travaux dirigés à Saint-Hippolyte com­mencent à 16h30. Son amie Barbara est partie au Venezuela avec son mari pour ensemble déguster le miel de leur lune. J'envoie demain à Kate quelques beaux timbres et un petit mot tendre qui, tout de même, lui rappelle sa fainéantise à m'écrire des mots d'amour. Entends-tu Kate ?
Minuit, le dodo ne va plus tarder. Quelques no­tions soporifiques de droit fiscal suffiront.

Mardi 5 novembre.
Deux journées en trombe.
Le directeur adminis­tratif et finan­cier a pris ses fonctions.
Mon travail est monstrueux et voilà que je re­tourne à Paris demain soir. La misère universi­taire va m'envahir.
Aujourd'hui, notre ancien offsettiste, le ras-du-sol Musclor, a fait son apparition dans les locaux. Pitoyable et revendicatif, il déclare ne rien toucher des assedic et nie avoir démissionné de l'association. Ratouillé ratatiné sur sa médiocre merde, il est gentiment convié à débarrasser le plancher.
Une Kate de rêve, à midi. D'une tendresse prenante. Je ne résiste pas à la séduction. Ce soir, une Kate à la folie. Friponne sans retenue, histoires et blagues se chevauchent. Exemple : elle m'avoue que, petite, elle s'amusait à enrober de sucre glace des crottes de bique, à les emballer dans du papier argenté et à les offrir aux accointances antipathi­ques. Coquine.
Dans ses travaux dirigés, un condisciple qui a raté ses examens à ma droite. Garçon seul, étouffé par sa mère qui l'accompagne à toutes les épreuves, perturbé par de d’énormes problèmes psychologiques qui le rendent infréquentables. Si sa conversation n'est pas sotte, il se réduit à la débilité par la non conscience de sa personne et par des complexes abêtissants. Kate me raconte qu'au premier de ses T.D., le vieux garçon s'est déchaussé, la puanteur ne tardant pas. Situation grotesque qui déclencha le fou rire chez Kate et sa copine.
Je m'offre maintenant aux songes.

Mercredi 6 novembre.
Retour sur Paris.
Curieux destins, curieuse logique des séries. J'apprends, ce soir, que ma grand-mère est à l'hôpital, le col du fémur cassé. Victime d'un étourdis­sement dans sa cuisine, elle est tombée comme une masse. L'opération s'est bien déroulée, mais elle ne pourra plus jamais marcher avec facilité. Ma maman va essayer de les faire rentrer (avec mon grand-père) dans une maison de retraite de l’Hérault. Après la marraine de Kate, la gaieté n'est pas à l'ordre du jour.

Vendredi 8 novembre.
Beaucoup de mal à me réadapter à la vie pari­sienne et à ses incessantes pertes de temps.
Je me rends compte de l'énormité des pro­grammes cumulés de deux maîtrises. Etant donné mes activités, je ne pourrais travailler le droit que les soirs de la semaine et le week-end. Je me dé­brouille pour dégoter ça et là des cours d'amphi. Fini le temps des réflexions en langueur, l'efficacité est de mise pour éviter de fracassantes déconvenues. Et puis j'ai des devoirs à assumer. L'université, elle, sent la gaminerie et l'immaturité. Je n'y vais que pour la peau d'âne que je me confectionne.
Vu Kate hier et aujourd'hui. Ses petites choses n'ont en rien altéré l'intensité de nos retrou­vailles. Que de sauvagerie dans nos enlace­ments, que d'abyssaux baisers échauffant nos sens, que de chaleurs moites irriguant nos pores. J'apprécie le déchaînement de cette tigresse fra­gile.

Mardi 12 novembre
Réveil en catastrophe pour prendre le train à l'aube. Week-end prolongé de délices avec Kate. Il est temps d'ôter son bonnet de nuit et de retour­ner au charbon.
Ce soir, grosses bourrasques et petites goutte­lettes : le majestueux tilleul joue de toutes ses
ramures. Plus trop le temps de m'attarder à ces notes. Le travail m'appelle.
Kate attendait ce soir mon coup de fil. Voilà qui est fait : nous pourrons dormir en paix.
En ce moment, l'actualité se répand sur la lourde question de la peine de mort. Prétexte de cette frénésie de plateau : des petites filles violées et tuées par un « monstre irrécupérable ». La justice person­nelle, déterminée et prête à assumer ses responsabilités, je n'y vois aucun inconvénient. Le droit d'une société à décider de la mort de tout un chacun, c'est la doter d'un pouvoir trop grave et bien au-dessus de sa qualité.

Mercredi 13 novembre
La fuite des jours est insensée. Je commence à peine mon année universitaire et Noël pointe déjà son petit nez blanc.

Jeudi 14 novembre
Journée infernale. Départ du château à 8h30 pour Lille. La société Kodak nous a invité pour la présentation de ses nouveaux matériels reprogra­phiques. Je découvre rapidement Lille en voi­ture : ville beaucoup plus belle et aérée que je ne me l'étais bêtement imaginé. Destination : hôtel de luxe ; une salle y a été réservée pour la petite ré­ception. Pas un ingrédient ne manque : cadre agréa­ble, commerciaux suants de la main droite et enculeurs de première, petits fours variés et hô­tesses pine-au-cul-mettables comme on dit par chez nous.
Folie douce : je prends le train de 13h55 pour rejoindre Paris. J'en profite pour griffonner quelques notes universitaires pour mes tra­vaux dirigés de fin d'après-midi. Dans le train, point d'événements bandants. Tout juste le temps de poser mon sac de voyage à Pantin et me voilà fusant vers le centre Saint-Hippolyte au sud de la capitale.
Mon groupe de T.D. : à quatre vingt quinze pour cent des femmes. Bon nombre de pipelettes, aucune ré­vélation de beauté ou d'intelligence (ouf Kate !). En droit fiscal des affaires, nous décou­vrons une masse devosienne, la tronche de Tchernia, insolent en diable, rouge comme l'enfer, bourré de parti-pris et très distrayant dans son numéro. S'il arrive à nous faire décou­vrir la merde des fiscqueux en nous tirant le sou­rire, je lui tirerai en plus mon chapeau. Sa réputation est exécrable d'après les bruits de couloirs. Peu m’importe.
J'embrasse ici tendrement ma Kate préfé­rée : huit mois que ça dure notre histoire ! Bravo les petits.

Vendredi 15 novembre
Journée sans grand rendement. Un peu de gé­rance, un peu de droit, beaucoup d'amour. Notre intimité étend sa palette à chaque nouvelle fusion. Kate vivifie sa passion pour mieux me dévorer. Je ne sais ce qui adviendra de notre attachement réciproque, de nos promesses et de nos projets, mais à l'instant précis où Kate m'enveloppe la bouche de ses lèvres chaudes, au moment où elle me glisse sa langue agile dans l'oreille, à chaque manifestation de sa féminité, je m'éclaire d'un épanouissement ardent. Le démarrage est sans conteste au quart de tour.
Le vieux Montand nous a quitté depuis bientôt une semaine. Il repose au côté de la Simone au casque d'or décomposé. Tintouin inimaginable autour de cette disparition. Chanteur des Feuilles mortes et des Roses de Picardie ; comédien du Salaire de la peur et de Z, il méritait certes un hommage. Mais pourquoi nous asséner tous ces panégyriques pour une capacité prétendue à s’engager au nom d’idées pas toujours ébouriffantes ? L'opinion est-elle à ce point en manque de morts glorieux ou géniaux ? P'tête ben...
N'oublions pas cette loi médiatique : quand un grand scientifique, écrivain, méde­cin, ou sculpteur passe l'arme à gauche, il a vaillamment droit à un entrefilet ; quand un clown arrête son char, il est déifié à la une. Média de masse, média de m... (Clin d'œil au socialisant Polac et à son scribouilleur d'alors.)
Mitterrand son quatre-heures et sa Cresson sont toujours vivants.

Lundi 18 novembre
Gentil petit week-end où l'amour et le droit ont fait bon ménage. Léger accrochage avec Kate : je lui refais le refrain sur son incapacité à respecter les horaires qu'elle donne. Toujours une bonne excuse et petite moue repentante pour la pirouette. Je me fais un devoir de lui casser ses mauvaises habitudes.
A être aimé, efforts exceptionnels.
D'une psychologie fragile, elle subit actuel­lement une mauvaise atmosphère familiale.
Train très tôt ce matin pour reprendre mes fonctions à la seru. Les choses à faire se bousculent. J'actualise mes données sur les services littéraire et commercial. Rentrop m'explique ses grosses difficultés à pêcher ça et là les ou­vrages originaux ; j’entr’aperçois Leborgne qui me laisse un bilan détaillé du sponso­ring et de la publicité réalisés.
Heïm nous a expliqué la nécessité de suivre ses conseils pour parvenir à notre indépendance et à la pérennité des structures. Nous devons nous en remettre bien naturellement à lui pour la conduite fondamentale des entreprises. Sens des responsabi­lités, humilité, confiance absolue en Heïm et esprit d'initiati­ve : quelques-unes des belles qualités à assimiler.

Mardi 19 novembre.
Un fonctionnaire de l'URSSAF a osé nous importuner dans notre travail. Et ce pour un problème sans intérêt. Il a voulu se poser en donneur de leçon le pauvre bonhomme. Alice l'a vu trois minutes, puis je me suis plus spécialement occupé de son cas, après avoir eu Heïm au téléphone. Froid et déter­miné je l'ai invité à rabattre son caquet, à ne plus jamais débarquer à l'improviste et déranger des gens qui bossent, au contraire de ces dangereux porteurs de petits pouvoirs. S'il transgresse la règle élémentaire de prendre rendez-vous avec notre directeur administratif et financier pour tous ses problèmes urssafeux il aura de gros en­nuis. Petite boule assermentée, il s'est très vite dégonflé : excuses, promesses, mais gluance im­parable.
Heïm m'a dit qu'il ne fallait plus jamais se lais­ser « empapaouter » par ces terreurs de seconde zone.

Mercredi 20 novembre
La fin du mois approche, et l'angoisse du chef d'entreprise monte tout naturellement. Hier soir, chèque de cent six mille francs en règlement d'une facture de la sebm. Au­jourd'hui, bien obligé de parapher un autre bout de papier de cent vingt-cinq mille francs pour ré­gler les postcontacts d'octobre. Dur, dur... Grosse réorganisation à mettre en oeuvre à la sebm pour faire baisser les prix de revient.
Heïm nous a parlé, à midi, de Bob Denard, invité chez Dechavanne, l’animateur à oeillères du mardi soir. Un aventurier vrai de vrai, mercenaire bienfaiteur, [...] d'une épaisse et imposante carapace, franc et direct dans sa mentalité.
Oublié de noter ma fascination pour un peintre visionnaire. Le courant existe depuis une dizaine d'années. Pures et apaisantes, les compositions de Di Maccio renouent avec l'authentique création picturale. Aux antipodes des ignobles escrocs d’un certain art dit moderne. Je voyais encore le réalisateur Claude Berri, de passage dans le Bouillon de culture de Pivot, nous présenter des croûtes à chier, et s'extasier devant une monochromie ou un barbouillage primaire de pseudo artistes. Voilà ce qui fait s’extasier Jack Lang, ministre de la culture qu'on aurait peut-être dû écarter dix ans avant. Il ne veut pas entendre parler des sublimes vision­naires, de la grâce fantastique de leurs toiles, du travail incommensurable et du talent essoufflant qu'elles représentent. Non ! la grande perche, issue du giron mitterran­dien, se sent davantage « interpellée » par des entassements de boites de conserve et par les colonnes de Buren dont il peut se faire de bicolores suppos.
Résultat des courses : toutes les toiles des visionnaires sont achetées par les Japonais assez au fait des choses de l’art pour ouvrir un musée qui leur est consacré. Conne de France socialiste.
Jeudi 21 novembre
Amusante anecdote narrée par le gros Beynard, maître d’oeuvre de nos travaux dirigés en droit fiscal des affaires. Chaque individu peut déduire de ses traite­ments et salaires dix pour cent au titre d'une évaluation forfaitaire des frais professionnels. Toute une série de fonctions (V.R.P., pilotes d'avion, mannequins) se voient accor­der un abattement supplémentaire pou­vant aller jusqu'à quarante pour cent. Au cours des années soixante-dix, décision d'organiser une grande émission télévisuelle contre ces pri­vilégiés, puis de mettre au point une grande marche en référence à la Nuit du 4 août et à l'abolition des privi­lèges. Un journaliste s'informe auprès de notre narrateur sur sa situation fiscale. Beynard lui rappelle alors qu'il fait parti des privilégiés (déduction supplémentaire de vingt pour cent). Aïe, le bouche-à-oreille fera son chemin : plus d'émission ni de défilé.
Kate a reçu ce matin par la poste mon petit cadeau : une bague en or, agré­mentée d'une perle de culture et d'un petit diamant. Très touchée, émue de mon attention. L'amour, ça ne se contrôle pas. A côté de ces tendres rapports, je la réprimande un peu ce soir pour une mauvaise approche d'une situation que je n'ai pas envie d'évoquer ici.
Sortie mondiale du nouvel album de Michaël Jackson. Très belle réussite musicale.

Vendredi 22 novembre

Mauvaise journée. Matinée à me dé­placer dans cette capitale de merde. Sale fin d'après-midi
avec Kate. Ce soir la déprime m'effleure. Tout au­rait dû être parfait. Le hic : Kate se ramène en jeans. Je dois être trop porté sur les détails, mais elle ne comprend pas mes exi­gences, répond à toute critique par une autre et joue la petite effron­tée. Moment gâché, sans intérêt, si ce n'est celui d'atteindre mon fra­gile équilibre.
Nos caractères demeu­rent incompati­bles. Je ne sais pas où tout cela va nous mener, mais j'ai à l'instant, au fond de la gorge, la plus éprouvante des tristesses et la plus vive des détestations. Une haine d'amoureux en quelque sorte. Fermer sa gueule ou provoquer l'impasse. Et l'intelligence bon dieu de merde !
Ces tracas, dont j'aurais pu me pas­ser, empêchent toute concentration pour étudier le droit fiscal des af­faires.
Réconciliation au téléphone tard dans la nuit. Nos torts expliqués, nos craintes dévoilées, nous allons tout faire pour rendre nos rapports les plus doux possibles.

Lundi 25 novembre
Doux dimanche avec Kate. Présen­tation le samedi soir à mon père. Pas une bonne chose. Je n'aime pas Kate en prestation. Discrète au départ, elle ne tarde pas à se faire valoir, à exister, quitte à user de mé­chanceté. Par ce qu'elle m'a dit je lui accorde le pardon.
Dans mon esprit, et je le lui ai dit, la première des présentations aurait dû se faire avec Heïm, mais je ne la sens pas encore prête, et mon père piaffait tellement d'impatience... Erreur de ma part, peut-être. Faiblesse sûrement.
Reste que, dans l'intimité, Kate et moi ne sommes que complicité et tendresse. Dommage qu'elle ait encore ses ruptures de personnalité.
Reprise du travail. Il faut que je me secoue un peu plus. Je ne me trouve pas très efficace. Ces se­maines découpées qui se suivent à toute allure ne sont pas mises à pro­fit au maximum. Il me faut davantage de sérieux et de rigueur. Dernière semaine du mois, nous devrions passer ric-rac.
Diarrhée des 7 d'or à la té­loche. Les vomisseurs, en grande pompe, exhibent leur minable haine jalouse ou leur gonflement méprisant. On sort les reliques avant qu'elles ne crè­vent pour de bon comme Cousteau et Jammot. Le bientôt quadragénaire An­toine de Caunes, ravalé à la catégorie animateur de variété type Foucault-Sabatier, reçoit son Sept presque comme une humiliation. Et coule la médiocrité am­biante.

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